Jeunes gens et jeunes filles, tous vont vers les lieux auxquels ils sont destinés; le soleil se lève à l'aube et descend à l'ouest derrière les collines. Les hommes engendrent et les femmes conçoivent. Les enfants, eux aussi, vont là où ils doivent aller.
Ainsi donc, sois heureux. Des odeurs et des parfums sont déposés devant toi, ainsi que des fleurs pour les bras et le cou de ta bien-aimée. Des chants et de la musique t'attendent. Mets de côté tout souci; ne pense qu'à la joie jusqu'à ce que vienne le jour où tu descendras vers le pays qui aime le silence.
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Suis ton coeur tant que tu vis. Mets l'encens sur ta tête. Revêts le lin et le parfum des dieux. Suis ton désir. Écoute ton coeur. Prépare-toi autant de bonheur que tu peux tant que tu es sur Terre. Que consume ton coeur jusqu'à ce que vienne ce jour où les supplications n'auront pas cours, où même le coeur des dieux se sera tu et n'entendra plus tes suppliques.Sur l'amour
Ton amour est dans ma chair comme un roseau dans les bras du vent.
Noire est sa chevelure, plus que le noir de la nuit, plus que les baies du prunellier. Rouges sont ses lèvres, plus que les grains du jaspe rouge, plus que les dattes mûres. Et bien plantés sont ses deux seins sur sa poitrine.
Ô mon bien-aimé, il m'est doux de plonger, de me baigner devant toi, que je te laisse contempler ma beauté dans ma tunique du lin royal le plus fin quand elle est mouillée. J'entre dans l'eau avec toi et j'en ressors, tenant un poisson rouge splendide entre mes doigts. Ah! viens, regarde-moi.
L'amour de ma belle est sur l'autre rive, un bras du fleuve est entre nous et le crocodile se tient sur le banc de sable. J'entre à l'eau, je plonge dans le flot. Mon coeur est puissant sur les ondes, l'eau est comme terre sous mes pieds. C'est son amour qui me rend fort ainsi, pour conjurer les dangers du fleuve.
Ta peau est comme la baie de la mandragore.
Durant des heures, je demeure éveillée allongée jusqu'à l'aube! Mon coeur brûle pour toi. Mon désir tend tout entier vers toi! C'est ta voix qui dispense la force à mon corps.
Mes yeux sont aussi grands que Memphis tellement je suis affamée de te voir.
Mon bien-aimé trouble mon coeur par sa voix. La souffrance s'empare de moi. Ma mère a raison quand elle dit de m'en méfier. Mais mon coeur souffre quand je pense à lui, car l'amour de lui me possède. Ah certes, c'est un insensé, mais je lui ressemble.
Douces sont les paroles de ses lèvres, qui jamais n'expriment des mots superflus. Son cou est long, ses seins lumineux, sa chevelure du vrai lapis lazuli. Ses bras sont plus beaux que l'or, et ses doigts sont semblables aux boutons de lotus. Reins alanguis et hanches minces, ses jambes proclament sa beauté. Noble est son maintien quand elle marche. Elle capture mon coeur par ses baisers. Le cou de chaque homme à cause d'elle se retourne pour mieux la contempler. Heureux celui qu'elle embrasse, il devient le premier des hommes.
Sur le mariage
Ne fait pas le grand personnage dans ta maison envers ta femme si tu sais qu'elle est bonne. Ne lui dis pas: «Où est ceci? Apporte-le nous» quand elle l'a mis à la bonne place. Que ton oeil observe. Et garde le silence pour reconnaître sa valeur. Elle est heureuse lorsque ta main est sur la sienne.
Je t'ai épousée quand j'étais jeune homme. J'étais avec toi, je ne t'ai pas délaissée, j'ai évité que ton coeur fût chagriné. Et voilà que tu empêches mon coeur d'être heureux.
Sur l'ivresse
On me dit que tu délaisses l'écriture et que tu t'abandonnes aux plaisirs: tu traînes de rue en rue, empestant la bière... Te voici comme un gouvernail brisé...
Sur l'humanisme
Une bonne parole est plus cachée que l'émeraude; on peut la trouver auprès des servantes qui travaillent aux meules.
Ne frustre pas le pauvre de ce qu'il possède... C'est le souffle vital du misérable que son bien: qui le lui ravit l'étouffe.
J'ai protégé le faible du plus fort, donné du pain à l'affamé, de l'eau à l'assoiffé, un vêtement au dénudé. J'ai inhumé celui qui n'avait pas de fils.
J'ai pris soin des ibis, faucons, chats et chiens divins, et je les ai rituellement inhumés, oints d'huiles et emmaillotés d'étoffes.
Sur la vieillesse
Les cheveux gris me sont venus, la vieillesse avance et les jours de mon déclin sont là. La décrépitude a pris la place de la vitalité et chaque jour je note une nouvelle atteinte à l'âge. Ma vue baisse, mes oreilles se bouchent, ma force diminue, mon cerveau s'obscurcit, ma bouche reste muette et ne parle pas, mon coeur laisse tout échapper et ne retient même pas les événements de la veille. Chacun des os de mon corps me fait mal, le plaisir n'est plus que malheur et tout goût a disparu.
Sur l'autre monde
Lorsque vient la Mort, elle saisit le nourrisson suspendu au sein de sa mère aussi bien que celui qui est devenu un vieillard.
Il viendra aussi pour toi, ce jour de lamentations, mais les cris ne délivrent pas un homme de l'autre monde.
Il n'y a pas de tombeau pour le rapace.
Sur l'immortalité
Le roi s'enfuit loin de vous, ô mortels. Il n'est plus de la terre mais du ciel. Comme un nuage, il s'envole vers le ciel comme l'épervier, et ses plumes sont pareilles à celles de l'oie sauvage. Il s'élance vers le ciel comme une cigogne, il baise le ciel comme un faucon, il saute vers le ciel comme une sauterelle. Il monte vers le ciel sur le vent. Il est une flamme qui s'élève sur les ailes du vent vers les confins du firmament. Les escaliers du ciel s'abaissent devant lui pour qu'il puisse monter.
Sur la Divinité
L'homme est limon et paille.
Ô Dieu qui nous a faits et qui chérit ton oeuvre, berger plein de sollicitude pour ton troupeau.
Le malheur est grand en Égypte. On voit pleurer Héliopolis, pleurer Hermopolis, pleurer Thèbes. Mais l'agneau mettra fin au malheur.
Sur les anciens Égyptiens
Ils expriment à travers l'apparence, ce qui n'appartient pas à l'apparence. (André Malraux)
André Phaneuf
20 juillet 1997
A la mémoire de Monique Perreault-Phaneuf (1940-2000)
URL d'origine : http://www.microtec.net/aphane/perles.htm (fermé au 20/10/2010)